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Notre voyage en Australie
8 décembre 2011

Saison 3. Episode 1. « La fois où on a découvert qu’il n’y avait pas de témoin lumineux pour la réserve d’essence du van. »

Dimanche 23 octobre 2011 :

Déjà 13h. Direction Brisbane, dans un van rebaptisé « sauna ». Au bout d’une demi heure (seulement), Flo proposait (déjà?) une pause café. Mais nous tenions à remplir notre objectif journalier, donc pas question de traîner. Déjà la fin d’après midi. Et l’aiguille du réservoir qui se rapprochait dangereusement de zéro. Pourtant les stations se succédaient les unes après les autres.


« _Flo, restent vingt bornes avant la prochaine grande ville, les prix y seront peut être plus raisonnables pour refaire le plein? On attend?

_J’sais pas, où en est la jauge?

_Sur VIDE depuis un quart d’heure. Mais y’a pas de témoin lumineux.

_Ba normalement, sur une voiture, ça s’allume tout le temps non? Moi j’en sais rien, c’est toi qui vois, tu conduis tout le temps, donc tu connais mieux le van que moi. »


Merci. Nous v’la avancés. On attendra le témoin. Cheveux aux vents, la course descendante du soleil annonçait une soirée douce et la brise légère sur nos visages séchait lentement nos litres de sueur déversés. Une départementale à l’ombre, nos regards perdus au loin. Derrière nos Ray Ban, nous fixions le GPS qui indiquait une heure d’arrivée satisfaisante. Tu me remercieras quand on gagneras 4 dollars sur le plein d’essence, on a bien fait de…

Soudain, une sorte de trou dans le champignon droit.

Morgan: « Merde. »

Flo: « …c’était quoi ce truc!? »

Morgan: « Fais ch***. »

Flo: « Qu’est-ce qui se passe? »

Comme seule réponse, j’ai mis les warnings, geste sûrement peu convaincant sur le moment.

Flo: « Mais réponds moi! »

Many: « …(rien)… »

Flo: « Mais la jauge était même pas allumée!! »

C’était bien ça le problème. A cet instant, chaque dizaine de mètres parcourue paraissait ultra importante. Histoire d’aller le plus loin possible avec l’élan du van. Jusqu’à l’arrêt complet. Final. Le néant. Silence assourdissant dans l’habitacle, et aucun de nous deux n’osait l’interrompre. Les quatre yeux fixant dans les rétroviseurs, chaque véhicule nous doublant lamentablement. Nouvelle démonstration du manque de lucidité dont est capable l’être humain lorsqu’il se retrouve dans une situation dite « peu confortable ». Comme deux lapins pris dans les phares d’une voiture. Incrédules. Absurdes.


« Qu’est-ce qu’on fait? ». Flo avait déjà eu le courage de soulever le débat. Toujours aussi silencieux, j’observais un pick-up qui venait de faire demi-tour et qui s’apprêtait selon toute vraisemblance à nous venir en aide. Spontanément.

Laissant ma belle sur le siège passager, après lui avoir sèchement suggéré de « ne surtout pas le quitter » (chose fortement déconseillée dans ce genre de situation), je m’approchais de l’inconnu, serrant les fesses pour ne pas voir une bagnole s’emplafonner notre pare-choc arrière.

« _Whowaille spapeunou fowaw, deudi spoutf.

Oups. Adieu l’accent encore compréhensible de Sydney. Bonjour l’arrière pays. Et son accent Malabar.

« Euh ze fioule of maille car… it’s EMPTY. » Ouais là, c’est certain, j’avais mis toute mes chances de mon côté. Surprenant la manière dont le stress pouvait très rapidement restreindre vos automatismes linguistiques. Dans un élan d’amour-propre, je lançais mes dernières cartouches, en essayant de rattraper le coup. « Sorry, I am French. »

 

Je m’attendais à ce qu’il sorte un Jerry-Can d’essence, de quoi soulager la soif terrassant de Many, mais quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’il empoigna une corde en nylon pour nous remorquer (ou pour m’étrangler, étais-je en train de m’imaginer). Il accrocha notre voiture derrière la sienne, sous nos yeux médusés.

« Un peu dangereux ici, n’est-ce pas? » m’a-t-il lancé entre deux bourrasques de semi-remorques. Sans blagues, tu crois que je m’entraîne volontairement à faire des créneaux dans un virage d’une départementale limitée à 90km/h? Restons calme, ce plouc est pour l’instant notre Messie. La deuxième partie de notre sauvetage fut toute aussi déplaisante. Suivre cet homme au point mort, en freinant quand il le fallait. Au bout de dix kilomètres, il nous laissait à une station essence, avant de repartir aussi vite qu’il était arrivé, accompagné de nos remerciements les plus sincères. A nous de refaire un vrai plein, de dépuceler le Jerry-Can, erreur qui n’aurait jamais du être commise, et de terminer chemin qui nous restait à parcourir. Le trajet pouvait reprendre. Nos coeurs pouvaient rebattre.

Déjà 22h.

Enfin à Brisbane.

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Commentaires
M
Bravo pour la prose, je ris toute seule dans la cuisine et imagine la scène sans problème, j'aurais aimé être petite souris et voir la tête de ma Flo
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